Votre rapport soulignait le manque d’homogénéité entre départements et de coordination au niveau national. Que proposez- vous pour y remédier ?
Michelle Meunier : l’article 1 de notre proposition de loi porte sur la création d’un « conseil national de la Protection de l’enfance », instance interministérielle qui serait chargée de la cohérence et de l’animation du dispositif au niveau national. Ce conseil national donnerait une véritable impulsion et permettrait à l’Etat de mieux jouer son rôle de pilote de la politique de protection de l’enfance.
Et concernant la place des professionnels ?
Muguette Dini : Plusieurs articles les concernent directement. Tout d’abord, nous souhaitons que les demandes de formation émanant des travailleurs sociaux des départements soient davantage prises en compte. Au-delà de cette catégorie de personnel, il serait souhaitable que tous les professionnels accompagnant des enfants – enseignants, professionnels de la petite-enfance, police… – suivent une formation les sensibilisant à la détection de cas de maltraitance, pourquoi pas sous la forme d’un module commun à tous. En termes d’organisation, nous proposons, dans l’article 4, que soit nommé au sein des services de PMI un médecin référent chargé de faire le lien entre les différents intervenants, en particulier en direction des médecins de famille. Nous savons qu’ils sont en première ligne de la détection des cas de maltraitance et que, pourtant, ils sont très peu à faire des signalements. En ayant la possibilité de s’adresser à un référent, ils trouveraient des conseils et pourraient mieux faire circuler l’information.
Votre rapport s’engageait en faveur du développement de l’adoption simple. Restez-vous sur cette position ?
Muguette Dini : Tout à fait. Précisons que cette proposition, précisée dans l’article 12, est commune à différents rapports publiés récemment, tel celui d’Adeline Gouttenoire. L’adoption simple est une des solutions qui doit permettre à un enfant placé de grandir, en sécurité, dans une famille. Pour cela, il faut que les différents intervenants, en premier lieu les travailleurs sociaux, évoluent dans leurs principes, s’éloignent de la formation familialiste pour convenir que les liens avec la famille d’origine ne sont pas forcément à maintenir à tout prix. C’est l’esprit de notre proposition de loi : rééquilibrer la loi de 2007 en la centrant sur l’enfant plus que sur la famille.
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Un documentaire TV, « Enfance en détresse, la honte ! », diffusé mardi 16 septembre 2014, pointait l’absence de contrôle financier des établissements accueillant des enfants placés. Abordez-vous ce point ?
Muguette Dini : Non, mais il nous apparaît évident qu’il incombe aux départements de contrôler rigoureusement les structures qu’ils financent. La protection de l’enfance représente une part importante des dépenses des départements, environ 20 %, autant que le handicap. Quand tant d’argent public est en jeu, il convient de suivre très précisément sa dépense. Il faudrait aussi que les élus s’intéressent davantage à la question de la protection de l’enfance. Lors de nos auditions, nous avons constaté que cette politique est confiée aux services. Peut-être n’est-il pas très valorisant pour un élu de communiquer et de s’emparer de cette problématique ?, il est vrai, sensible, voire gênante.
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Votre proposition de loi pourrait être examinée dans quel délai ?
Michelle Meunier : Rapidement, nous avons bon espoir. Nous savons que la ministre des affaires sociales est sensible à la question. Nous souhaitons qu’elle tienne compte de l’ensemble de nos propositions, et même, qu’elle aille plus loin.
Références