Pourquoi avez-vous choisi de diriger l’Inet ?
Il s’agit pour moi d’une vraie opportunité. Je suis ravie de rejoindre l’Inet à ce moment particulier de son histoire. Je travaille dans la FPT depuis 1995 ; c’est un monde professionnel que je commence à connaître. J’ai passé mon concours d’administrateur (promotion Jean Vilar – 2001-2002) sans forcément me projeter sur ce que pouvait couvrir la notion de direction générale et de pilotage stratégique. Même moins développée à l’époque, l’Inet m’a vraiment ouvert les yeux.
Depuis, je suis aussi restée en lien avec le monde associatif, le CNFPT, pour lequel j’ai rédigé des sujets de concours, etc. Lorsque j’étais directrice des territoires d’action sociale, DGA « ressources », puis DGS, je me suis toujours intéressée à la formation des cadres. J’ai présidé le jury du concours d’administrateur territorial, lors du recrutement de la promotion « Simone de Beauvoir » (2013-2014). Je n’ai jamais complètement coupé le lien.
J’estime qu’on n’arrive pas quelque part par hasard. Lorsque j’ai appris le départ de Jean-Marc Legrand, j’ai posé ma candidature. Après des fonctions plus généralistes, je souhaitais me tourner vers un poste davantage spécialisé. Je suis aussi ravie de rejoindre le CNFPT, qui a beaucoup évolué.
Je tiens à dire que je ne suis pas partie en raison du contexte de la réforme territoriale. J’ai eu la chance de bien connaître les départements aux côtés de Claudy Lebreton (président du conseil général des Côtes d’Armor et président de l’Assemblée des départements de France, ndlr). J’ai acquis la conviction profonde de l’intérêt de cette échelle de collectivité, notamment en milieu rural. Je suis convaincue qu’un modèle décentralisé est approprié. Il apporte beaucoup à la qualité des politiques publiques, davantage qu’une gestion peut-être plus technique.
Où en est le projet « Inet 2020 » ? En quoi consistent les changements à venir et quel est le calendrier ?
Le projet « Inet 2020 » a fait l’objet de nombreuses concertations. Il sera soumis au vote du Conseil national d’orientation du CNFPT le 15 octobre, puis du conseil d’administration le 5 novembre. Nous pourrons communiquer sur ce projet par la suite.
Je crois beaucoup au rattachement de l’Inet avec le CNFPT. C’est aussi tout l’intérêt de cette école. En tant que cadre, on ne peut pas avoir une pensée pour ses agents de catégorie A, une autre pour les « B » et une autre pour les « C » : il faut un projet managérial qui englobe tous les agents, car tous travaillent ensemble. Le projet « Inet 2020 » n’est pas déconnecté de cette vision inter-catégories.
Par ailleurs, l’Inet n’a pas attendu ce projet particulier pour avoir des projets. L’école intègrera au 1er janvier la formation des conservateurs de bibliothèques. L’Inet est aujourd’hui une école qui a gagné sa reconnaissance dans le milieu territorial. Certes, il reste de nombreux changements à opérer. Les réflexions actuelles, sur le nombre de fonctionnaires, le « trop d’impôts »… obligent à aller sur les fondamentaux et à réinventer en permanence nos façons de travailler.
L’une des dimensions importantes du projet « Inet 2020 », c’est de bien affirmer la place et la connaissance des élus locaux. La démocratie locale, des citoyens qui ont la main sur leurs services publics…, font aussi toute la différence par rapport à l’Etat ; ce n’est pas la technicité.
Justement, que répondez-vous à ceux qui souhaitent une fusion entre l’Ena et l’Inet ?
Proposer la fusion, c’est partir d’une réelle méconnaissance de ce qu’est l’Inet. D’abord, elle ne forme pas que les administrateurs territoriaux. Le rattachement au CNFPT a aussi tout son sens. Les collectivités comptent une majorité d’agents de catégorie C. En outre, d’autres mutualisations existent déjà, entre écoles de la FPT. Tandis qu’au niveau de la FPE, les mutualisations sont encore à réaliser. A l’Inet, les professionnels sont très engagés, au niveau des concours, des intervenants, etc. L’Inet fonctionne avec des méthodes collaboratives, ce qui n’est pas le cas de l’ENA. La FPE et la FPT ont aussi ceci de différent que dans la seconde, nous sommes multi-métiers, nous ne sommes pas « thématisés » : un DG traite à la fois de la voirie, de l’action sociale, des bibliothèques, de la protection sociale, etc. L’Etat et la territoriale n’ont pas du tout le même modèle de pilotage.
Pour bâtir une charte du management dans une collectivité, il n’y en a pas une pour les directeurs, une autre pour les chefs de service. Il s’agit d’une seule et même charte. L’Inet traduit aussi cette attente. Il ne faudrait pas perdre notre approche inter-filières et inter-catégories. En outre, les administrateurs sont plus amenés à travailler avec des ingénieurs qu’avec des membres de ministère.
Des modules communs avec l’ENA ont par ailleurs été mis en place. J’ai déjà rencontré le directeur des études de cette école et nous avons convenu de travailler sur quelque chose de plus intéressant que l’existant. Et ce n’est pas parce qu’il y a deux écoles que les mobilités n’existent pas. Certains administrateurs territoriaux deviennent sous-préfets, rejoignent une chambre régionale des comptes, etc. De même, les collectivités comptent de nombreux fonctionnaires d’Etat. Le travail avec les élus est spécifique aussi.
C’est un peu comme avec la réforme territoriale, l’approche par rationalisation peut arriver seulement une fois qu’on s’est posé la question du sens.
L’ENA est une grande école mais avec la fusion, nous aurions plus à perdre qu’à gagner par rapport à ce qui existe et qui se construit en termes de diversité. Un rapprochement Ena-Inet créerait une caste des A+, ce qui serait regrettable.
Un rapport récent de l’administration (« L’encadrement supérieur et dirigeant de l’Etat ») préconise d’au moins organiser un concours commun. Qu’en pensez-vous ?
Les oraux de l’Inet sont souvent centrés sur la perception des citoyens sur les collectivités, ce qu’est la démocratie locale, ce qui n’est pas forcément le cas à l’ENA.
Par ailleurs, je suis directrice des concours et de la mobilité des cadres de direction ainsi que de la délégation à la recherche. Ce regard global me paraît important.
Encore une fois, je ne suis pas convaincue que casser une mutualisation au bénéfice d’une autre serait une bonne idée et permettrait de réaliser des économies.
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