Une étude inédite du Collectif national des jeunes urbanistes (CNJU), que La Gazette s'est procurée, montre, à partir de données collectées dans les centres de gestion, à quel point les difficultés d'accès à l'emploi sont grandes pour les urbanistes, depuis que la spécialité "urbanisme, aménagement et paysage" du concours d'ingénieur leur a été fermée.
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Alors que plus de 6 000 urbanistes travaillent dans les collectivités locales, l’accès de ces professionnels à la fonction publique territoriale s’est complexifié depuis 2009, année où le concours d’ingénieur territorial spécialité « urbanisme, aménagement et paysage » a été fermé aux diplômés des formations en urbanisme à caractère universitaire, qui doivent se tourner vers le concours d’attaché territorial, qui comporte également une spécialité « urbanisme ».
Pour les associations professionnelles d’urbanistes, la coexistence de deux spécialités « urbanisme » pour l’accès à deux grades distincts suscite des tensions au sein des équipes en raison des disparités de statut, de rémunération, de perspectives d’évolution… Une situation pointée dans un rapport réalisé en 2011 par le cabinet Aristat (Agence de recherche et d’ingénierie statistique et qualitative) pour le compte du CNFPT, rappelle le Collectif national des jeunes urbanistes (CNJU).
88 % de CDD – Autre problème signalé par le CNJU : le nombre de postes d’urbanistes ouverts au concours d’attaché territorial est « très limité » et insuffisant pour répondre aux besoins des collectivités qui recourent massivement aux CDD (88 % des jeunes urbanistes diplômés recrutés par les collectivités locales entre 2011 et 2014 l’ont été par ce biais selon une enquête menée par le collectif au printemps dernier).
Depuis 2009, les associations professionnelles ont relayé cet état de fait auprès des différents cabinets ministériels concernés. Jusqu’à ce qu’une réponse de juillet 2013 de Marylise Lebranchu, ministre de la Décentralisation et de la fonction publique, mette fin au débat en indiquant qu’il fallait « maintenir le caractère scientifique et technique du cadre d’emplois des ingénieurs territoriaux ».
Conditions de réussite – « Nous avons pris acte de cette décision mais pour autant, nous ne nous satisfaisons pas de ce statu quo et pensons qu’il faut travailler sur des voies alternatives », témoigne François Favard, président du CNJU. Pour étayer sa réflexion, le CNJU vient de produire une note visant à « analyser les conditions de réussite aux concours d’attaché territorial et d’ingénieur territorial, lors des trois dernières sessions (2010, 2011 et 2012) ».
Réalisée à partir des données collectées auprès des centres de gestion organisateurs des concours, cette enquête montre qu’avec 102 postes ouverts en moyenne, « la spécialité urbanisme [du concours d’attaché] ne permet pas de couvrir le besoin exprimé par les collectivités locales ». C’est aussi la spécialité la plus sélective (7 % de candidats potentiellement admissibles en moyenne contre 15 % pour la spécialité « administration générale »).
A l’inverse, la sélectivité de la spécialité « urbanisme » du concours d’ingénieur est « très faible » (34 %) avec un nombre de postes ouverts 2,5 fois plus élevé que dans la filière administrative alors que les candidats y sont deux fois moins nombreux (743 contre 1 402).
Première étape – « Ces résultats confirment ce que nous pressentions : il y a un important décalage entre les deux filières et il n’y a pas suffisamment de postes ouverts, relève François Favard. Cela rejoint également les constats du rapport Aristat de 2011. » Avant de préciser que cette note, diffusée en exclusivité sur le site de La Gazette, constitue une première étape dans la réflexion actuellement menée par le CNJU pour de nouvelles modalités de reconnaissance des urbanistes au sein de la FPT.
Note CNJU Analyse Acces Urbanistes Concours FPT Sept2014 by lagazettefr
L’urbanisme en collectivité se trouve malheureusement coincé entre les 2 filières techniques et administratives… qui n’ont pas sû s’adapter aux réalités.
D’un côté, une filière administrative axée sur le droit public, de l’autre une filière technique dépendante du lobby des écoles d’ingénieur. Au milieu, les profils des formations sciences éco/sociales.
Les urbanistes en font partie, mais que dire des économistes SANS aucun concours adapté? Pas étonnant que dans la fonction publique on ne comprenne rien à l’économie du monde réel…
Au fond, pourquoi 2 filières sur ce modèle alors qu’il existe dans les faits 2 groupes de métiers: les fonctions supports (RH, commande publique, finances, social/éduc) et les fonctions de développement (urba, transports, économie, habitat, environnement, déchets, eau)? Et pourquoi pas un seul cadre d’emploi des cadres territoriaux avec des variantes suivant la technicité/encadrement?
Le problème des urbanistes, ce qu’à la sortie des écoles, il n’y a pas de concours adapté. Ils prennent donc ce qu’il reste (les contrats CDD ou les BE) et se trouve comme parias de la FP-T alors qu’ils sont l’un des métiers les plus utiles!
On est donc bien dans l’adéquation concours-besoin / public-moyens.
Le concours d’ingé était donc utile pour les urbanistes, mais il faisait chier les vrais ingés durs qui pensaient se la couler douce : l’AITF en ce sens est très divisée, y compris entre les ingés d’Etat et les autres…
Bref, sans réforme pensée, on ne pourra que constater la casse. Dommage.