L’arrêt rendu récemment par la Cour administrative d’appel de Marseille le 4 avril 2014 , qui porte sur des faits dramatiques, retire à la définition usuelle une condition qui paraissait pourtant aller de soi : l’intention de nuire. La Cour vient ainsi bouleverser la notion même de harcèlement : la volonté malveillante qui caractérise l’aspect psychologique du harcèlement ne serait plus nécessaire à sa qualification juridique.
Les faits en cause résultaient, ainsi que l’ont relevé les juges, plutôt que d’une réelle « volonté de nuire », d’une succession d’erreurs notoires dans la prise en compte de la situation d’un agent, de l’absence de réactivité de la commune, et plus globalement d’un manque d’attention particulière qu’aurait nécessité la fragilité de l’agent. On peut ainsi regretter que la qualification retenue de la faute n’ait pas fait l’objet d’une certaine nuance au regard de ces critères.
Afin de prendre en compte la spécificité de cette situation, la Cour administrative d’appel de Marseille aurait pu envisager de faire œuvre créatrice en concevant deux types de fautes, dont les conséquences sont certes identiques et doivent conduire aux mêmes conclusions, mais dont l’origine est à notre sens distincte. D’une part, le harcèlement en tant que tel, défini par la loi et la jurisprudence antérieure, dont l’intention de nuire serait une condition nécessaire. D’autre part, la faute ou les fautes tenant d’une gestion inappropriée de la situation professionnelle et personnelle d’un agent que l’on sait en difficulté par ailleurs, qui pourraient aisément se rattacher notamment à un manquement à l’obligation de protection que tout employeur public a à l’égard de ses agents ( Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, article 11).
En tout état de cause, cette évolution jurisprudentielle ne peut qu’appeler aujourd’hui les communes, et plus globalement les employeurs publics, à porter une attention toute particulière à la situation de leurs agents les plus fragiles, et assurer ainsi à leur égard une gestion réactive et appropriée tant du suivi de leur carrière, que de toute difficulté qu’ils seraient susceptibles de rencontrer dans leur environnement professionnel.
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