Dans nombre de directions des affaires culturelles, les agents s’interrogent sur l’avenir de projets conduits par l’équipe municipale précédente. « Il est indiscutable que les communes – comme les autres niveaux de collectivités territoriales – ont intégré un discours de réduction de leurs budgets avec un argument : la baisse de la dotation globale de fonctionnement de l’Etat, constate François Pouthier, président de l’association des directeurs de la culture des départements, Culture et départements. Les maires nous disent : ’La situation est grave’. »
Dans certaines villes, le couperet est déjà tombé. A Toulouse (Haute-Garonne, 439 553 hab), par exemple, un des premiers actes de Jean-Luc Moudenc, nouveau maire (UMP) a été l’abandon de la Maison de l’Image dans le quartier de la Reynerie alors que les entreprises avaient été choisies et que le chantier était prêt à démarrer. Le premier magistrat de la ville rose a préféré abandonner un projet jugé coûteux et au « contenu flou » dans un contexte financier « dégradé » qui impose de faire des choix. Au coût prévisionnel de 23 millions d’euros, il fallait, justifie-t-il, ajouter deux millions d’euros de coût d’exploitation par an. Compte-tenu des sommes engagées et des indemnités dues, le maire espère une économie d’une vingtaine de millions d’euros. Une somme qui alimentera le « bouclier protecteur » qu’il veut constituer pour affronter la baisse des dotations de l’Etat.
Un centre d’art contemporain, jugé plus porteur – Autre exemple, Montpellier (Hérault), où le chantier d’aménagement de l’hôtel Montcalm en « Musée de l’histoire de la France et de l’Algérie », à peu près à mi-parcours, a été stoppé net par un vote du conseil municipal du 19 juin. Au grand dam du comité scientifique qui dénonce la brutalité de la méthode. « C’est un dossier délicat, je le sais. Un chantier enlisé, sur lequel, contrairement à ce que l’on m’avait dit, il reste deux ans et demi de travaux. C’est un coût de 23 millions d’euros, dont 10 millions déjà dépensés, assure le maire (divers gauche) Philippe Saurel. Je prends mes responsabilités, parce que c’est de l’argent public. » Philippe Saurel veut faire à la place un centre d’art contemporain, jugé plus porteur pour attirer des touristes, mais dont le coût n’a pas été chiffré.
Parfois, l’inquiétude porte sur le simple maintien de certaines activités au long cours : ici, il est question de renoncer à une école de musique ; là, on évoque la fermeture du théâtre municipal ; ailleurs on maintiendra la salle de spectacles, mais avec une programmation moins culturellement moins exigeante, pour s’assurer un taux de remplissage élevé. En Gironde, certaines communes réduisent l’action d’éducation artistique et culturelle en temps scolaire, pour la faire glisser vers le périscolaire. D’autres procèdent à des baisses lissées, mais qui peuvent atteindre jusqu’à 15%.
Les associations et les compagnies – « Mais globalement, la baisse des financements concerne surtout des tiers : les associations, les compagnies », observe François Pouthier. Elle n’affecte peu les moyens humains des structures municipales. « Deux phénomènes se conjuguent : les contraintes budgétaires grandissantes, d’une part, et le fait que certains élus n’hésitent plus à mettre en cause la place de la culture dans les politiques culturelles », analyse une directrice des affaires culturelles. « Il est clair que la culture est désormais traitée comme les autres domaines de l’intervention publique communale. Elle n’est plus un enjeu politique », confirme François Pouthier.
A contrario, dans certaines villes, les nouveaux élus sont arrivés avec des projets dans leurs cartons. A Angers (Maine-et-Loire), le maire (UMP) Christophe Béchu compte « réinvestir » le Grand Théâtre. A Reims (Marne), le maire (UMP) Arnaud Robinet compte, par exemple, créer une « biennale des arts urbains et contemporains ».
« Je rencontre aussi actuellement de nouvelles équipes municipales qui souhaitent se lancer dans de nouveaux projets d’action culturelle, veut croire François Pouthier. Certes, il s’agit beaucoup d’équipements mais pas que …Demeurons donc optimistes ! ».
Politique culturelle ou politique artistique ? – C’est souvent le spectacle vivant qui a la faveur des élus, sans doute plus immédiatement visible que les politiques au long cours, comme la lecture publique, ou les enseignements artistiques. « Une politique culturelle ne peut se réduire à une politique artistique », s’inquièteVéronique Balbo-Bonneval, présidente de la Fédération nationale des associations de directeurs des directeurs des affaires culturelles (FNADAC). C’est justement pour identifier les bons enjeux et re-positionner la place de la culture dans l’ensemble des politiques publiques locales que la FNADAC tiendra ses assises nationales, à Saint-Denis, en octobre prochain sur la « dimension culturelle du développement des territoires ».
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Post-municipales : les grands projets passés au peigne fin
Sommaire du dossier
- Post-municipales : les grands projets paient les pots cassés
- A Montpellier et Montpellier Agglo, le nouveau maire Philippe Saurel laisse déjà sa patte
- A Toulouse, des choix drastiques sur l’aménagement urbain
- A Dole, la nouvelle équipe fait marche arrière sur les projets de mobilité
- Les équipements mais aussi les activités culturels dans la balance après les municipales
- « Les arrêts de projets et de chantiers représentent un véritable gâchis d’argent public »
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