Qu’entend-on exactement par l’évaluation d’une politique publique ?
Evaluer consiste à rechercher la valeur contenue dans les services rendus par les politiques publiques mises en œuvre et par leurs programmes. Il s’agit de faire une évaluation quantitative ou qualitative de leurs résultats ou de leur impact, de voir le retour de la mise en œuvre d’un programme d’une politique publique. A ne pas confondre avec le contrôle et l’audit, ou encore l’inspection de la régularité d’un processus. L’évaluation s’intéresse au point de vue de toutes les parties prenantes d’un programme, de celles qui y ont un intérêt, c’est-à-dire des connaisseurs, des sachants qui sont à la fois dans le processus de mise en œuvre mais aussi bénéficiaires de la politique. Par exemple, les jeunes doivent avoir leur mot à dire sur le fonds d’expérimentation jeunesse.
Est-on prêt en France à réellement évaluer nos politiques publiques ?
Au sens international du terme, je n’en suis pas sûr. Des pas décisifs ont été franchis. Il existe une mission d’évaluation à l’Assemblée nationale. Les études d’impact précèdent dorénavant toute nouvelle loi (même si les arguments des attendus sont assez maigres car réalisés par des personnes ayant avant tout une culture juridico-politique au lieu d’une culture socio, économico environnementale plus large). Le secrétariat général de la modernisation de l’action publique (SGMAP, NDLR) a un programme d’une cinquantaine d’évaluation des politiques publiques. Mais la démarche d’évaluation n’est pas encore intégrée au cycle des politiques publiques comme il l’est dans d’autres pays. Le métier lui-même n’est pas reconnu. Il y a peu de formations, et il a été difficile de le faire rentrer dans les modules de formation à l’ENA et à l’Inet. Il y a encore beaucoup à faire.
Quel a été le moteur de ces premiers pas ?
La RGPP était devenue une démarche de coupes budgétaires. Or il existe deux écoles : la performance des politiques publiques associée à des coupes (le nouveau management de la performance) et puis la nouvelle de la gouvernance publique qui s’intéresse davantage aux services rendus modulo la contrainte budgétaire. Le SGMAP s’est plutôt orienté vers cette dernière.
Où en sont les collectivités territoriales ?
Jusqu’en 2012 (avant que l’Etat ne s’y engage), l’évaluation des politiques publiques se retrouvait plutôt du côté des collectivités territoriales. Le conseil général du Finistère a par exemple restructuré tout son budget en termes de missions, programmes, objectifs mais aussi ses commissions pour que l’évaluation devienne incontournable. Des rapports de suivi de l’évaluation ont été mis en place. Tout ce travail est intégré dans le document d’orientation budgétaire. Le retour du savoir évaluatif est couplé au cycle du programme, de la politique et de la dépense. Cette démarche est cependant répandue de façon très inégale selon les collectivités. Lorsque les unités d’évaluation sont placées au plus près du DGS, on constate que la démarche est mieux intégrée dans la collectivité que lorsqu’elle est noyée dans l’organigramme. La taille compte aussi beaucoup car créer des capacités de captage de retour d’information suppose d’avoir des compétences en ressources humaines : l’agglomération, le département ou la région sont la bonne échelle.
Comment mettre en place une démarche d’évaluation des politiques publiques ?
Il faut concevoir la démarche dès le début du programme. Cela suppose aussi d’avoir un système d’information, notamment numérique, qui permette l’échange, dans lequel les personnes peuvent se renseigner, donc l’ouverture des bases de données. Il faut aussi souvent apprendre en faisant et trouver le portage politique de façon à créer une capacité et une pratique de l’évaluation.