Interview : Yann Le Meur, professeur associé à l’université de Sciences économiques de Rennes I, Président directeur général de Ressources consultants finances
La Gazette : Alain Guengant et vous-même dites (et enseignez) que la TPU constitue le système financier le plus complexe jamais mis en place. Ne faudrait-il pas le simplifier ?
Ce système de mutualisation des croissances de charges et de ressources est effectivement complexe. Cette complexité se révèle sur deux plans. Tout d’abord, le fonctionnement de la TPU est systémique, faisant appel à de multiples facteurs imbriqués relevant d’ensembles différents, interdépendants mais autonomes, dont les dynamiques interagissent. Ensuite, l’évaluation des charges transférées d’investissement fait appel à un degré de technicité élevé et à des méthodes très complexes pour qui n’est pas qualifié en économie et finances.
La TPU a été voulue sur le plan théorique comme un système de régulation permettant la substitution. Mais cette régulation échappe aux acteurs multiples de sa mise en oeuvre, ne serait-ce que parce que se déploie au sein du système une multiplicité de forces divergentes, voire contraires, de décisions politiques individuelles.
Ce qui est compliqué et illisible, c’est l’imbrication et les flux croisés, sur fond de subsidiarité et d’éclatement de l’intérêt communautaire. Si on voulait vraiment simplifier, il faudrait alors supprimer tout cela
par la fusion.
Laissez-moi tout de même regretter qu’on n’ait pas commencé par un système plus simple que la TPU, que nous avions élaboré dans un programme de recherche en 1998, consistant en la « fiscalité mixte intégrale » , combinant la conservation des impôts ménages additionnels avec la mutualisation supracommunale de la TP.
La Gazette : Les maires ont-ils été nombreux à utiliser l’interco comme une pompe à finances ?
Je ne dirai certainement pas cela. Ce que je mets en lumière dans mon cours depuis 2001, c’est que la complexité et l’inaboutissement de l’intercommunalité en TPU portent en germe des risques de déséconomies d’échelle et de superposition de projets, de nature inflationniste.
On peut, sans généraliser (il y a autant de modes de gestion intercommunale que d’EPCI), visiter ces facteurs de risque d’augmentation future – qui serait jugée trop importante – de la pression fiscale :
On a souvent rejeté « l’intercommunalité de gestion » au profit de la noble « intercommunalité de projets ». Ce faisant, on minimisait la fonction de substitution, visant à une gestion regroupée plus efficace, pour favoriser un dispositif de superposition dans lequel un projet intercommunal, économique et politique, s’ajoute aux projets des communes, avec à la clef un besoin de financement récurrent. Pourquoi pas, car il faut bien répondre aux besoins des populations, mais cela engendre naturellement de l’impôt, puisqu’on étoffe l’offre de services.
La complexité du système de flux croisés que constitue la TP unique (TPU) a finalement créé par endroit l’illusion d’une capacité de financement supplémentaire, qu’on trouvait dans l’appropriation supracommunale de la croissance de la TP mutualisée, là où il s’agissait seulement d’un transfert de ressources interne au groupe territorial. La seule véritable capacité supplémentaire de financement qu’apporte la TPU réside dans le surplus récurrent de DGF consolidée que procure au groupe territorial l’intercommunalité de TPU.
On comprend souvent mal la notion d’économie d’échelle. Quand la communauté engage un projet que personne n’aurait réalisé tout seul, c’est parce qu’il coûte moins cher par habitant en raison de l’effet de taille (ou économie de dimension). Mais il s’agit d’une dépense – en plus – et non d’une dépense – en moins – comme on le comprend souvent à tort au sujet d’une « économie ». Le fait intercommunal se révèle donc ici générateur de coût supplémentaire.
La parcellisation des transferts de compétences entraîne des d
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