C’est une vision très critique du cadre actuel du renouvellement des concessions du parc hydroélectrique français qui a été brossée par les rapporteurs, à travers des travaux qui ont fait l’objet d’une centaine d’auditions. Pourtant, comme l’a souligné François Brottes en préambule, «cette énergie hydraulique a vocation à constituer le cœur de la transition énergétique ». Et d’ores et déjà, « cinq difficultés majeures apparaissent », a expliqué Marie-Noëlle Battistel, qui imposent « la révision du cadre actuel du renouvellement des concessions ».
Distorsion de concurrence – En toile de fond, l’examen de l’ouverture à la concurrence chez nos voisins : « Plusieurs pays voisins d’où sont issus certains candidats à la reprise des concessions en France –Norvège, Suisse- n’ont pas ouvert la gestion de leurs propres parcs hydrauliques à la concurrence », ont pointé d’entrée de jeu les rapporteurs. Autre inquiétude, la question des emplois sur les territoires : « La mise en concurrence ferait perdre le contrôle de la production d’électricité la plus compétitive du mix énergétique national, et mettrait en cause la pérennité des industries électro-intensives sur le territoire (FerroPem, Rio Tinto Alcan, Alteo…) » s’inquiètent-ils.
Emplois menacés – Enfin, « la mise en concurrence prévue, qui envisage de séparer les ouvrages situés dans une même vallée entre plusieurs opérateurs, menacera l’optimisation de la production et sera source de nombreux contentieux ». En conséquence, les deux rapporteurs estiment que les destructions d’emplois apparaissent comme inévitables.
Petite hydroélectricité – Selon Marie-Noëlle Battistel, « la petite hydroélectricité est la grande oubliée des questions énergétiques. » De fait, les petites centrales, d’une puissance installée inférieure à 4,5 Megawatt, suscite une attente très forte des élus sur les territoires concernés (Adour-Garonne…). La petite hydroélectricité représente un potentiel brut de 10,6 TW/heure, dont 1,1 sur les ouvrages existants. Mais les évolutions législatives et réglementaires, en particulier la loi sur l’eau du 30 décembre 2006, imposent de nouvelles contraintes environnementales portant sur les continuités écologiques, et le classement des cours d’eau. Des dispositions qui « divisent par trois le potentiel de ces petites installations » déplore Marie-Noëlle Battistel. Cette dernière propose un assouplissement des mesures, qui passerait par un nouveau classement des cours d’eau, « chaque projet étant étudié au cas par cas, avec une étude d’impact systématique ».
Enfin l’équation économique de la petite hydroélectricité devrait également être repensée, à travers notamment une réflexion sur le basculement des tarifs d’achat, difficile pour les petits producteurs d’électricité, une disposition contenue dans la loi Nome.
Grands ouvrages – Eric Straumann a exposé la problématique des grands barrages, qui sont la propriété de l’Etat, 80% étant exploités par EDF, et 20% par la Compagnie Nationale du Rhône.
Lors de la future ouverture à la concurrence, trois critères devraient être pris en compte :
- les projets devront favoriser la modernisation des équipements, et assurer une meilleure productivité.
- Ils devront garantir la protection des écosystèmes,
- et maximiser le taux de la redevance, afin de constituer un signal fort.
Reste que selon le rapporteur, « le maintien d’un parc intégré favoriserait de nouveaux emplois ». En revanche, une ouverture à la concurrence « sauvage » pourrait avoir d’autres conséquences : « EDF pourrait avoir à gérer des sureffectifs » s’inquiète Eric Straumann…
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