Les faiblesses, déjà connues, sont relevées avec sévérité : effort « particulièrement insuffisant » pour former les chômeurs, « résultats médiocres » des contrats aidés (emplois temporaires subventionnés), chômage partiel sous-utilisé, etc.
Les contrats aidés par exemple, marotte des gouvernements récents, sont durement montrés du doigt. « Leur utilisation dans le secteur non marchand a persisté en France, alors qu’elle a été abandonnée dans la plupart des autres pays en raison de sa faible efficacité en matière d’insertion durable dans l’emploi. Le recours à ce dispositif dans le cadre de la réponse à la crise apparaît donc discutable. »
En effet, moins de 40 % des personnes en contrat aidé non marchand sont en emploi six mois après, contre plus de 70 % pour ceux qui ont bénéficié de contrats dans le secteur marchand.
La Cour pointe le ciblage « défaillant », les « durées trop courtes » et l' »accompagnement insuffisant » des contrats aidés dans le secteur non-marchand. Selon elle, la tendance à la dégradation du ciblage dans les prescriptions de contrats aidés a été particulièrement nette après 2008 et n’a pas été infléchie par la création du contrat unique d’insertion (CUI).
Elle préconise de « revoir l’équilibre » au bénéfice du secteur marchand, sauf quand les contrats du secteur non marchand préparent une insertion ultérieure, et de réserver l’accès aux contrats aidés aux seuls bénéficiaires qui ne peuvent pas être orientés vers des dispositifs dont l’efficacité apparaît mieux fondée.
Autres propositions :
- assortir systématiquement l’exécution du contrat d’une formation allant au-delà de l’adaptation au poste de travail ;
- moduler l’aide en fonction de la qualité de la formation prévue par le contrat.
Cibler les moyens sur les plus fragiles – Présenté quelques jours après l’accord sur la réforme du marché du travail, qui doit être transposé dans une loi, le rapport de l’institution émet 25 recommandations pour réorienter les politiques en faveur de l’emploi (50 milliards d’euros en 2010) vers « les salariés les plus fragiles, peu formés ou en emploi précaire ».
Si l’activité a mieux résisté en France, le chômage y a plus augmenté à partir de 2009 car les entreprises ont préféré réduire les effectifs (CDD et intérimaires d’abord) que le temps travaillé (ajustements travail-salaires, chômage partiel), au contraire de l’Allemagne, note la Cour.
Les plus précaires ont été les plus « affectés ».
Simplifier le recours au chômage partiel – En période « de chômage élevé et de ressources budgétaires rares », la « seule possibilité » est « de mieux cibler les instruments disponibles sur les demandeurs d’emploi qui en ont le plus besoin », a résumé mardi le premier président, Didier Migaud, selon le texte de son discours transmis à l’AFP.
L’accord du 11 janvier a apporté des « réponses » à certaines recommandations, note-t-il, comme simplifier le recours au chômage partiel et augmenter la cotisation chômage sur les contrats précaires.
De façon générale, le système « n’est pas en mesure d’orienter efficacement les dispositifs vers les publics identifiés comme prioritaires » et d’éviter les « effets d’aubaine ».
Ce constat vaut pour les contrats de professionnalisation et les contrats de sécurisation professionnelle (CSP) que la Cour suggère d’ouvrir à ceux qui en ont le plus besoin, pas forcément les licenciés économiques.
Réviser l’indemnisation chômage – L’institution s’inquiète également de l’avenir de l’assurance chômage, dont le financement apparaît « difficilement soutenable », avec un déficit cumulé prévu de 18,6 milliards en fin d’année.
Plus « protecteur » et généreux qu’ailleurs en Europe, ce régime que les partenaires sociaux doivent renégocier en 2013 « a bien joué son rôle de maintien du revenu » mais « voit désormais son efficacité se dégrader, son équité se fragiliser », selon le rapport.
Une nouvelle fois, la Cour épingle l’indemnisation des intermittents (un milliard de déficit « au profit de 3 % seulement des demandeurs d’emploi »).
Les régions dans le FPSPP – Elle propose aussi d’abaisser les indemnités des plus hauts niveaux et de revoir « l’indemnisation en activité réduite », en pointant le « risque » que l’assurance-chômage finance « un revenu de complément durable à des salariés en activité précaire ».
Par ailleurs, au niveau de la gouvernance, « l’efficacité et la transparence » du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), créé en 2009, doit être « améliorée ».
En effet, l’absence des régions dans les appels à projets, alors même que la loi en prévoyait la possibilité, a restreint ses moyens.
Les recommandations sont nombreuses – même si elles ne sont pas nouvelles – pour améliorer la gouvernance, selon la Cour des comptes qui parle de « gouvernance publique et paritaire complexe et insuffisamment coordonnée » – comme le font d’autres nombreux rapports.
Beaucoup d’espoir dans l’acte 3 – En effet, les actions menées par l’Etat, les régions, les partenaires sociaux, ainsi que leurs opérateurs (Pôle emploi, OPCA, etc.) se superposent sans véritable coordination.
La direction régionale de Pôle emploi en Ile-de-France a par exemple indiqué à la Cour des comptes participer à pas moins de 13 instances de coordination !
« Les réflexions actuelles sur la décentralisation doivent s’accompagner d’une simplification drastique de ce dispositif complexe qui fasse à la fois place à une gouvernance resserrée et à la nécessaire implication de la diversité des acteurs, souligne la Cour. Faute d’une telle évolution de la gouvernance, la constitution de blocs de compétences risque de segmenter au lieu de les articuler les actions menées en matière d’emploi, de formation professionnelle et de développement économique », insiste l’institution.
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