Le projet de Notre-Dame-des-Landes, un mal pour un bien ? C’est ce qu’expliquait le 29 novembre 2012 Gilles Retière, président de la communauté urbaine de Nantes, au théâtre du Vaudeville à Bruxelles lors de la remise à la ville du prix « Capitale verte de l’Europe 2013 ».
Evoquant la destruction de zones humides et d’espaces boisés, l’élu socialiste estime toutefois que le bilan environnemental présente un bénéfice supérieur au coût.
En 2009, Jean-Marc Ayrault précisait déjà que le transfert de l’aéroport libérerait ses 300 hectares au sud du périphérique, constituant ainsi « une opportunité pour lutter contre l’étalement urbain ».
Mais cette perspective suppose la fermeture complète de Nantes Atlantique, incompatible avec la pérennité de l’usine voisine Airbus : le maintien de la piste amoindrit du coup le potentiel constructible.
L’un des taux plus élevés dans l’Hexagone hors IDF – Or la disparition des terres agricoles est un sujet sensible en Loire-Atlantique : le taux d’artificialisation des sols s’élevait à 14 % en 2010, l’un des plus élevés dans l’Hexagone hors Ile-de-France selon les données Agreste.
Le service statistique de l’Etat souligne que ce mouvement sollicite désormais « l’ensemble de ses ressources foncières », y compris les espaces naturels.
D’où la mobilisation de la Confédération paysanne, syndicat à la pointe de la contestation à Notre-Dame-des-Landes : la commune est présentée par les scientifiques comme le château d’eau naturel du département, à cheval sur les bassins versants de la Loire et de la Vilaine.
« Ce territoire d’élevage fonctionne bien dans un bocage préservé avec des structures foncières adaptées », relève l’association Bretagne vivante.
Plus d’un millier d’hectares ? – Selon la chambre d’agriculture, la réalisation de la plate-forme aéroportuaire nécessitera de sacrifier 550 hectares (250 selon l’Etat) auxquels il faut ajouter 200 hectares liés à la desserte routière.
Les travaux toucheront partiellement ou totalement 45 exploitations.
Mais l’impact réel s’annonce encore plus important : en 2007, la commission d’enquête publique pointait « le lourd tribut » agricole, l’estimant à plus d’un millier d’hectares « à long terme ».
Et sans doute davantage encore car un tel équipement ne reste pas isolé en plein champ : habitat, activités économiques, services, etc. emboîtent alors le pas.
Quant au périmètre de protection des espaces agricoles et naturels (PEAN) prévu sur 19 000 hectares entre l’emprise aéroportuaire et Nantes, son intérêt est évident mais sa création n’interviendra pas avant 2015 au mieux et ne suffira pas à contenir la spéculation foncière, font remarquer plusieurs responsables associatifs.
Curieusement, la commission départementale de consommation des espace agricoles (CDCEA) ne s’est toujours pas penchée sur le dossier. Depuis sa création en mai 2011, l’occasion d’une auto-saisine s’est pourtant présentée plusieurs fois à elle.
Mission – Reste à connaître la position de la « mission agricole » confiée le 30 novembre par le gouvernement à Dominique Pélissié, ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts.
« Arrêter de considérer la terre agricole comme une réserve pour les projets »
Bernard Jochaud, président de l’association Terre de liens en Pays de la Loire
« Avec 2 000 hectares soustraits chaque année à l’agriculture, la situation en Loire-Atlantique n’est pas tenable. Et les dispositions du Grenelle de l’environnement sont insuffisantes. Il faut des mesures plus contraignantes. Un dispositif a fait ses preuves en Belgique : toute perte de terres agricoles doit être compensée par de nouvelles terres agricoles. En France, lorsqu’un agriculteur demande un foncier équivalent à celui qu’il lui faut céder pour un projet donné, on puise dans le stock des terres productives, ce qui se traduit in fine par un solde global négatif. Autre mesure : il conviendrait de taxer les parcelles non cultivées et du coup exemptes de l’impôt. Elles représentent 5 à 10 % de la surface agricole utile. Dans l’agglomération nantaise, une étude estime ces friches à 5 000 hectares. »
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