Quels seront les principaux axes de ce texte ?
Le projet de loi comportera un volet relatif à la clarification des compétences, avec de nouveaux transferts. Il créera un haut conseil des territoires, pour renforcer la concertation entre l’Etat et les associations d’élus locaux, et des conférences territoriales chargées d’organiser l’exercice de ces compétences à l’échelon local. Des mesures spécifiques concerneront le Grand Paris, mais aussi les métropoles européennes comme Lyon et Marseille.
En quoi consistera ce statut de métropole qui, selon François Hollande, « ira au-delà des établissements publics actuels » ?
Le gouvernement souhaite accroître les potentialités des très grandes métropoles françaises en instituant la métropole européenne. Cette dernière regrouperait plusieurs communes au sein d’un espace de solidarité pour élaborer et conduire ensemble un projet d’aménagement et de développement économique, écologique, éducatif, culturel et social de leur territoire, afin d’en améliorer la compétitivité et la cohésion à l’échelle nationale et européenne. Le régime juridique applicable prolongerait, dans ses grandes caractéristiques institutionnelles et financières, celui de la métropole. Il aurait vocation à organiser, par convention, ce développement avec les collectivités départementales, régionales et l’Etat, dans le cadre des conférences territoriales de compétences.
Combien d’intercommunalités pourront bénéficier de ce statut de métropole ?
Ce n’est pas une question de nombre, mais plutôt de définition, celle que l’on souhaite donner de la métropole. Il existe aujourd’hui deux entrées : d’une part, celle du seuil démographique, d’autre part, celle des fonctions structurantes de la métropole. La question n’est aujourd’hui pas tranchée.
Ce texte comprendra-t-il un volet relatif à la réforme de l’Etat ?
La réforme de l’Etat sera présente dans chaque mot, chaque virgule de ce texte. Je souhaite que l’exposé des motifs de ce projet de loi soit consacré à la redéfinition de la puissance publique au XXIe siècle. Le projet de modernisation de l’action reposera sur trois piliers : amélioration de la qualité du service public sur tout le territoire pour mieux répondre aux besoins et aux attentes des citoyens et des acteurs économiques et sociaux, association des agents et de leurs représentants à l’élaboration et à la conduite des réformes, définition des priorités des administrations afin d’assurer l’adéquation de leurs moyens à leurs missions.
Comment aborderez-vous cette préparation du projet de loi ?
Lors de l’écriture définitive du projet de loi, les syndicats de fonctionnaires seront étroitement associés : le suivi du chantier de la décentralisation figure en effet dans l’agenda social que nous avons présenté le 4 septembre. Pendant la discussion parlementaire au premier trimestre 2013, nous nous montrerons, bien sûr, ouverts à des amendements.
Quelle portée donnerez-vous aux schémas conclus entre les différents échelons ?
Aujourd’hui, les différents échelons dialoguent, souvent au sein de conférences d’exécutifs qui permettent de décider ensemble du financement d’une ligne à grande vitesse ou du déploiement du très haut-débit, par exemple. Beaucoup de régions ont déjà initié ce mécano institutionnel local. Nous souhaitons maintenant donner un cadre institutionnel fort à ces pratiques qui, un peu partout, se développent. Nous le ferons par la création des conférences territoriales des compétences.
Ce projet de loi permettra-t-il aux collectivités d’adapter les lois ?
Le législateur ouvrira des possibilités d’adaptations en fonction de l’histoire et de la géographie locales. Il renforcera la capacité d’expérimentation et d’innovation des collectivités. La décision finale appartiendra aux assemblées délibérantes, sur la base des propositions des conférences territoriales.
Quel sera le rôle des régions en matière de développement économique ?
Les régions seront chefs de file. Elles détermineront leurs pôles de compétitivité et leurs axes de développement. Comme l’a confirmé le président de la République lors des états généraux, la loi devra clairement confier aux régions l’ensemble des attributions qui sont encore celles de l’Etat en matière de formation professionnelle, d’orientation et de mise en cohérence des politiques d’accompagnement vers l’emploi au niveau territorial, afin qu’il y ait un meilleur lien entre les qualifications proposées et les besoins des entreprises. Aux régions, seront également transférées les politiques en matière d’aide et de soutien aux PME.
Dans les autres secteurs, comment allez-vous arbitrer les demandes parfois contradictoires des multiples associations d’élus ?
Nous n’hésiterons pas à dire « non » quand une demande menacera la cohérence de l’ensemble. Le travail parlementaire nourrira notre réflexion. Le haut conseil des territoires comme les conférences territoriales des compétences seront des instances où chacun sera libre de s’exprimer, de véritables lieux de débat.
Ce pari n’est-il pas risqué ?
Nous avons confiance dans les élus. Nous passons un pacte de confiance et de responsabilité avec eux. Nous transférons des compétences de la République et nous leur disons : « Choisissez votre organisation, territoire par territoire. » Une conférence pourra décider, par exemple, qu’une seule collectivité locale gère les lycées et les collèges ou qu’une région prend en charge la compétence « langue et culture minoritaire ». Grâce aux décisions prises dans ces conférences, chacun saura qui fait quoi.
Que se passera-t-il si la conférence territoriale ne parvient pas à un accord ?
La conférence territoriale des compétences sera un espace de concertation où chaque exécutif aura l’occasion d’exprimer son point de vue. Je fais confiance aux élus et suis intimement persuadée que ces conférences permettront d’aboutir à des compromis positifs.
Comment ce dispositif sera-t-il accompagné sur le plan financier ?
Il est indispensable de travailler sur une assiette fiscale pour les collectivités, en particulier les régions et les départements. Nous mettrons en place un pacte de confiance et de solidarité avec les collectivités, dans lequel elles s’engageront à gérer les compétences en contrepartie de moyens, mais sans compromettre l’objectif budgétaire de 2017.
Pourquoi voulez-vous créer un haut conseil des territoires ?
Nous avons besoin d’un lieu où l’Etat et les collectivités, et les collectivités entre elles, discutent de l’action publique, de son organisation, de son efficacité et de son financement. Il regroupera le Comité des finances locales, la Commission nationale d’évaluation des normes et celle sur le transfert des charges. Il sera saisi sur chaque texte intéressant les collectivités locales, ayant une incidence sur leurs ressources ou leurs charges, et avant chaque loi de finances. Le haut conseil des territoires sera une instance légère, sans administration.
Quelles associations d’élus participeront, de droit, au haut conseil ?
Bien entendu, les trois grandes associations représentant les élus (AMF, ADF et ARF) participeront et seront membres de droit du haut conseil. Deux principes devront toutefois être respectés : l’équité et la souplesse. L’équité pour assurer à chacune des associations le même poids et la souplesse pour permettre la représentation de la diversité des territoires en fonction des sujets traités.
Les autres principales mesures de l’acte III de la décentralisation
C’était sa première grande allocution devant les représentants des collectivités. Lors des états généraux de la démocratie territoriale, le 5 octobre, à La Sorbonne, François Hollande s’est élevé contre « la multiplication, la complexité des interventions locales et les financements croisés qui ajoutent encore à la confusion ». Revue des principales annonces présidentielles et des réactions qu’elles ont suscitées.
Transferts – La gestion des fonds structurels européens sera transférée aux régions. « Elle sera plus économe », s’est avancé François Hollande. « Ce discours confirme, précise et donne du sens au pacte que nous avons passé à l’Elysée, le 12 septembre », a salué Alain Rousset, président de l’Association des régions de France (ARF). « Nous ne sommes pas en phase avec Marylise Lebranchu sur la répartition des compétences, a-t-il cependant tempéré. Dans le haut conseil des territoires miniature, nous aurons en face de nous sept ou huit départements et dix agglos. Nous ne voulons pas que les autres niveaux exercent une tutelle sur nous, de la même façon que nous n’avons, nous-même, pas la moindre intention de ce genre. » La volonté de François Hollande de « confier aux départements l’ensemble des politiques du handicap et de la dépendance, hors du champ de l’assurance maladie » suscite aussi des crispations. « Le président de la République décide sans concertation la vente à la découpe de la politique du handicap », a stigmatisé l’une des principales associations du secteur, l’Unapei.
Elections – Face au risque de carambolage électoral en 2014, année où sont notamment prévues des municipales, des européennes et des sénatoriales, le chef de l’Etat a jugé « préférable de reporter à 2015 l’organisation, le même jour, des régionales et des départementales ». Il a souhaité que le mode de scrutin cantonal assure la parité et un ancrage territorial. Une formule qui passera soit par des tickets hommes-femmes sur des cantons agrandis, soit par des mini-listes sur des territoires infradépartementaux. François Hollande s’est fait l’apôtre du fléchage pour les intercos, écartant toute élection au suffrage universel direct sur une circonscription communautaire.