La fonction publique et le statut des fonctionnaires ont-ils beaucoup changé au cours du quinquennat qui s’achève ?
Dans l’ensemble, pendant cette période, la façon de modifier le statut a été davantage marquée par la continuité que par la rupture. Le gouvernement a préféré l’option consistant à revoir les règles, afin que le statut ouvre plus de possibilités pour les agents, plutôt que de modifier le socle statutaire.
Par ailleurs, cette mandature a prouvé que l’on pouvait faire évoluer les conditions de gestion du personnel public sans remettre profondément en cause ce socle. Reste maintenant à démontrer que cette souplesse profite aux agents. Je pense à la prime de fonctions et de résultats et à l’intéressement collectif. J’attends d’en voir les effets. Mais il est indéniable qu’une culture de la performance individuelle a été introduite dans le secteur public.
Assiste-t-on à une convergence des règles régissant le travail dans les secteurs public et privé ?
Je ne suis pas sûr que l’idée de fond du gouvernement ait été de contribuer à une telle convergence, que je considère, pour ma part, difficile à véritablement réaliser. Mais il apparaît clairement que des règles inspirées du Code du travail ont été adaptées pour les fonctionnaires. Ce n’est d’ailleurs pas un mouvement nouveau, que j’estime bénéfique.
Mais je ne qualifierais pas cette tendance de « convergence ». Il s’agit plutôt d’éviter de disposer de règles trop disparates entre les deux secteurs. Sur les grands principes, les différences entre public et privé n’ont pas été gommées.
La force protectrice du statut s’est-elle affaiblie ?
Je pense le contraire. Une seule disposition adoptée au cours de cette mandature peut être envisagée comme une brèche dans le caractère protecteur du statut. Il s’agit du placement en position d’activité du fonctionnaire dans le cadre d’une réorientation professionnelle, en cas de restructuration administrative (1).
A ainsi été ouverte la possibilité de mettre fin à la garantie de l’emploi à vie, mais on ne l’a encore jamais utilisée et on ne l’utilisera sans doute jamais ! Dans l’hospitalière aussi, en dépit des nombreuses réformes qui l’ont concernée, la garantie de l’emploi reste d’actualité.
Les fonctionnaires ont-ils perdu le sens de leur mission ?
Cette perte de sens a sans doute été particulièrement ressentie par les fonctionnaires des administrations déconcentrées de l’Etat. Ils ont pu se sentir décontenancés par la révision générale des politiques publiques [Lire notre dossier]. Mais les fonctionnaires, dans leur ensemble, ne me semblent pas si désorientés. Leur état d’esprit a changé : ils sont davantage conscients de l’importance de la performance individuelle, essentielle pour que les citoyens ne se détournent pas du service public. Je pense qu’ils sont désormais convaincus qu’ils ne seront reconnus que s’ils s’astreignent à cette culture de la performance. C’est un point sur lequel ils ont apprécié le quinquennat : cet appel à assumer leurs missions à un meilleur rapport qualité-prix.
Cet article fait partie du Dossier
Fonction publique : un choix de société
Sommaire du dossier
- L’émergence d’un « statut bis » ?
- Quand le public s’inspire du privé
- Les fonctionnaires, grands oubliés de la présidentielle
- Le statut : un édifice ébranlé mais solide
- Cinq ans de chantier pour le statut : « Une évolution sans remise en cause »
- Les collectivités ont-elles trop recruté ?
- Travail social : le Snuclias-FSU interpelle les candidats aux élections présidentielles et législatives
- Protection sociale des territoriaux : les réponses de six candidats
Notes
Note 01 Disposition contenue dans le décret n° 2010-1402 du 12 novembre 2010 relatif à la situation de réorientation professionnelle des fonctionnaires de l’Etat. Retour au texte